Le mot « laïc », est issu du latin laicus « commun, du peuple (laos) », terme ecclésiastique repris au grec d'église λαϊκός, laikos, « commun, du peuple (laos), par opposition à κληρικός, klerikos (clerc), désignant les institutions proprement religieuses. Le terme laicus est utilisé dans le vocabulaire des églises chrétiennes dès l'Antiquité tardive pour désigner toute personne de la communauté qui n’est ni clerc, ni religieux; c'est-à-dire profane en matière de théologie. Cependant, elle appartient bien à l'Église, dans le sens qu'elle en suit le culte (l'incroyance étant alors inconcevable à l'époque); et peut même y exercer des fonctions importantes. L'abstrait désignant cette position a donné en français le terme « laïcat ». Au Moyen Âge, le mot « laïc » distingue l'homme commun, qui doit être enseigné, de l'individu instruit consacré par son état religieux
Dans la culture musulmane, cette division entre clercs et laïcs n'existe pas. En Islam, on ne connaît ni clerc ni clergé qui puisse s'accaparer la gestion des consciences ou le monopole de la compréhension du message divin. En Islam, tout homme est donc clerc, imam ou non, et tout homme est avant tout laïc, imam compris.
Dans la langue Arabe, il n'y a pas un mot qui soit l'exacte traduction du mot "laïcité", pour la simple raison que tout homme est laïc et qu’il n’y a pas réellement un clergé à laïciser. (...) En arabe, la meilleure traduction du terme « laïcité » serait donc ‘al-hiyâd al-dîni » qui signifie "neutralité religieuse".
Outre qu'il s'agit là du terme le plus proche de l'idée exprimée par le mot laïcité, un grand nombre de verset coranique appellent explicitement à cette neutralité, à la liberté des consciences, a un libre choix de croire ou non :
"Point de contrainte en religion ; le droit chemin se distingue de l'errance".
[Coran - Sourate 2 – Verset 256 ]
"Dis : La Vérité émane de votre Seigneur. Croit qui veut ; et ne croit pas qui veut...".
[Coran - Sourate 18 – Verset 29 ]
Les actes du second calife de l'Islam - Omar ibn al-Khattab (le « Saint Paul » musulman)- illustre amplement l'interconnexion étroite entre l'Islam et la laïcité dans les questions relatives à la liberté d'expression ainsi que la tolérance vis-à-vis des autres religions.
Lors de la prise de Jérusalem, le patriarche Sophrone voulut traiter directement avec `Omar et que celui-ci vienne en personne dans la cité. `Omar accorda sa protection aux habitants de la ville au terme d'une lettre remise à ce patriarche. Il garantit la sauvegarde des sites chrétiens et donna ordre à ses hommes de ne pas les détruire et de ne pas les utiliser comme habitations. Le récit d'Eutychius raconte qu'`Omar ibn al-Khattab visita l'église de la Résurrection et s'arrêta pour s'asseoir sous son porche; mais, au moment de la prière, il s'éloigna de l'église et fit sa prière à l’extérieur. Il craignait que les générations futures ne prennent le prétexte d'une prière de lui à l'intérieur de l'église pour la transformer en mosquée.
Eutychius ajoute que Omar ben al-Khattab avait écrit un décret interdisant aux musulmans de se réunir en ce lieu pour y prier.
En exagérant mes propos et ma conviction de Français Musulman profondément laïc, j’ajouterais que les croyants français les plus proches de la laïcité sont les musulmans. Dans son enseignement, le prophète Mohammed a refusé que la religion ne devienne une spécialité exclusive des prêtres.
En Islam l’ultime autorité dans ce bas monde est un texte : le Coran - chacun le lit avec ses aspirations, ses attentes, ses soucis. Plusieurs interprétations sont possibles, et personne n'a le droit de forcer les consciences. Qui se dit musulman est considéré comme tel et son lien est direct, intime, avec le Créateur.
Ci-dessous la traduction d’une sourate qui instaure le respect et la tolérance vis-à-vis des non croyants :
Au nom de Dieu, Le Tout Clément, Le Tout Miséricordieux
(1). Dis, ô mécréants
(2). Je n'adore point ce que vous adorez
(3). Pas plus que vous n'adorez ce que j'adore
(4). Je n'ai jamais adoré ce que vous adorez
(5). Et vous n'avez jamais adoré ce que j'adore
(6). Vous avez votre religion et moi j'ai la mienne.
[Coran - Sourate 109]